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La sagesse spirituelle et pratique de la Dynamique en Spirale
La quête éternelle vers le haut
entretien avec le docteur Don Beck par Jessica Roemischer
La dynamique en spirale
WIE : Don Beck, pouvez-vous commencer par
expliquer le concept de base de la dynamique en spirale ?
Don Beck : Le concept de la dynamique en spirale est
que la nature humaine n'est pas figée ; tout n'est pas
joué à la naissance. Au contraire, nous avons les
capacités, par la nature même de notre esprit/cerveau, de
construire de nouveaux mondes conceptuels. Aussi, ce que nous
essayons de décrire est simplement comment les humains
sont capables, lorsque les conditions deviennent suffisamment
mauvaises, de s'adapter à leur situation en créant
de plus grandes complexités de pensée pour
gérer de nouveaux problèmes.
WIE : Pouvez-vous en dire davantage sur cette
capacité, qui semble propre à l'homme, de
développer des niveaux plus élevés de
pensée et de connaissance ?
DB : La Dynamique en Spirale a pour postulat que
nous possédons une intelligence adaptative,
" intelligence complexe, adaptative et contextuelle ", qui se
développe en réponse aux circonstances et
défis de la vie auxquels nous sommes confrontés ce que dans ce modèle de dynamique en spirale
nous appelons les Conditions de Vie. Ce sur quoi nous
portons systématiquement notre attention est la dynamique
d'ordre causal créée par les Conditions de Vie,
puis sur les types de mécanisme d'adaptation et
d'intelligence collective qui sont fabriqués en
réponse à ces conditions. Ces intelligences
collectives sont ce que nous appelons les memes *.
WIE : Vous semblez insister sur la nature
évolutive de l'intelligence humaine, qui nous permet de
nous adapter et de survivre à nos défis
existentiels, ou " Conditions de Vie ". Pouvez-vous en dire plus
sur l'importance évolutive des " mèmes " ?
DB : Comme les gènes, les virus et les
bactéries, les mèmes répondent au
même principe de base que l'on trouve dans l'univers, à
savoir le renouvellement, la capacité de
régénération. Chaque mème
successif implique un horizon plus vaste, un principe
d'organisation plus complexe, avec un nouveau calibrage des
priorités et des structures mentales, ainsi que des
lignes de fond spécifiques. C'est un moyen
résoudre les problèmes. C'est un moyen d'assigner
un ordre de priorité, de mettre en avant ce qui est plus
important et pourquoi, en réponse aux Conditions de Vie.
Et tout comme un code biologique ADN, code qui se reproduit
lui-même en se disséminant dans tout le corps, le code
d'un mème est un schéma
bio-psycho-socio-spirituel de type ADN, une empreinte qui se
répand à travers une culture, et joue son
rôle dans tous les domaines d'expression de cette culture,
modelant les codes de survie, la mythologie des origines, les
formes artistiques, les styles de vie, les appartenances
communautaires.
WIE : Donc, selon vous, à mesure que les
humains s'adaptent à leurs Conditions de Vie, cela
éveille de nouvelles sortes d'intelligence, ou des codes,
les " mèmes ", qui à leur tour façonnent
l'évolution de la culture.
DB : Oui. Et les cultures, comme les pays, sont
formées par l'émergence de ces
mèmes, ou systèmes de valeurs, qui
constituent le ciment qui relie un groupe, le définissant
comme type de population et réfléchissant la place
qu'il occupe sur la planète.
Mon vieil ami et collègue, feu le professeur Clare
Graves, avait l'intuition qu'il existait des modèles
sous-jacents dans l'évolution de la conscience humaine.
Il a identifié huit niveaux d'existence psychologique et
culturelle, ou systèmes de valeurs, qui sont devenus la
base de notre modèle en spirale. Les mêmes principes ou
niveaux d'existence s'appliquent aussi bien à une
personne individuelle qu'à l'ensemble d'une
société. Graves a impliqué des milliers de
personnes dans son étude, cherchant constamment à
déceler ces modèles sous-jacents qui, estimait-il,
reflètent différents niveaux d'activation de notre
système nerveux moteur.
WIE : Pourriez-vous esquisser le modèle en
spirale avec sa hiérarchie de huit mèmes,
ou niveaux d'existence ?
DB : Dans le langage de Graves, le " Premier Etage "
de la spirale est un ensemble de six mèmes
caractérisés par les notions d'existence
ou de subsistance. Cela veut dire que nous ressemblons
davantage à des animaux qu'à des dieux et que nous
avons à faire face à des problèmes
d'existence d'ordre essentiellement terrestre. Donc, le Premier
Etage (BEIGE, VIOLET, ROUGE, BLEU, ORANGE, VERT) rassemble nos
problèmes de " subsistance " ou de survie, tandis que le
Second Etage (JAUNE, TURQUOISE) œuvre à
l'élaboration de formes saines de tous les
systèmes du Premier Etage, dans le contexte d'une
communauté globale, riche en informations et hautement
mobile. Bien que Graves ait identifié huit niveaux
d'existence, avec un neuvième à l'horizon, la
Spirale est en expansion, ouverte sans fin, continue et
dynamique. Il n'y a pas d'état final, pas de destination
ultime, pas de paradis utopique. C'est une quête sans fin vers
le haut, dont chaque phase n'est qu'un prélude à
la suivante, puis la suivante, et la suivante.
WIE : Et qu'est-ce qui provoque l'émergence
évolutive de ces stades, ou mèmes, le
long de cette spirale ascendante ?
DB : Nos crises, parce qu'elles offrent les points
d'inflexion et les bornes repères qui déclenchent
le mouvement vers le prochain niveau de développement
humain. Et chaque niveau d'existence, ou mème,
ressemble plus à une vague montante, un système
vivant et fluide, qu'à une étape
hiérarchique rigide comme une marche d'escalier. Une fois
qu'un nouveau niveau apparaît dans une culture, tous les
stades précédents de développement restent
acquis dans le système de valeurs résultant. Dans
le langage de Ken Wilber, tout nouveau stade social " transcende
et inclut " chacun de ceux qui ont précédé.
Pour cette raison, les systèmes de pensée plus
complexes comportent de plus grand degrés de
liberté.
WIE : Pourquoi utilisez-vous un modèle en
spirale pour représenter l'émergence de ces stades
évolutifs de développement psychologique et
culturel ?
DB : La forme spiralée du tourbillon est ce
qui représente le mieux la façon dont
émergent les systèmes humains, ou
mèmes, car ils évoluent par niveaux de
complexité croissante. Chaque spire montante indique la
survenue d'une version plus élaborée de ce qui
existe déjà, chaque mème
étant un produit de son temps et de ses conditions. Et
ces mèmes forment des spires correspondant
à une complexité croissante chez une personne,
dans une famille, une organisation, une culture ou une
société. Nous vivons tous dans des états en
mouvement ; il y a toujours de nouveaux vins, toujours de
vieilles lies. Et l'on peut constater que tout ce processus
évolutif fonctionne, du fait même que nous sommes
toujours ici, que nous avons été capables de
survivre des milliers et des milliers d'années sous la
menace d'un environnement très hostile. Ainsi, nous
sommes en présence d'une espèce merveilleuse qui a
la capacité innée de se renouveler elle-même.
C'est ce qui fait de nous des humains.
*Le concept de " mème " fut proposé dans les années 70 par le biologiste évolutionniste Richard Dawkins. Selon lui, il fallait considérer l'évolution de la culture indépendamment de l'évolution génétique et biologique. Les " mèmes " de Dawkins désignent des " unités de transmission culturelle " spécifiques, telles que les chansons, les idées, les modes vestimentaires, parmi d'autres exemples. Toutefois, dans la Dynamique en Spirale, elles sont appelées " petits mèmes ". Lorsque Beck utilise le mot " mème ", il fait référence à un " système central de valeurs " ou " mème de valeurs ". Ces systèmes agissent comme " principes organisateurs " s'exprimant à travers les petits mèmes, et ils sont si essentiels à nos façons de penser qu'ils peuvent " se répandre à travers tout un groupe ou une culture entière, et structurer par eux-mêmes les états d'esprit ".
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